Introduction
Suite à l’un de mes derniers contenus, un abonné a réagi en me disant :
« Tu viens à peine de découvrir que le Japon va mal ? Delamarche en parle depuis dix ans ! »
Ce type de remarque m’a poussé à écrire cet article. Pas pour répondre à la personne directement, mais pour poser les choses à plat et vous donner mon avis cash, sans langue de bois, sur Charles Gave et Olivier Delamarche. Deux économistes que je respecte… mais avec qui je suis aussi en désaccord sur plusieurs points.
Ce que je vais partager ici, ce n’est pas une attaque. C’est une réflexion lucide sur l’économie, les limites du discours catastrophiste, et la nécessité de penser les marchés de manière stratégique — même dans un monde incertain.
Ce que je respecte chez Delamarche et Gave
Soyons clairs : je ne remets pas en cause leur compétence ni leur culture économique.
Olivier Delamarche a été l’un des premiers à dénoncer :
• Les dérives du quantitative easing
• La fuite en avant des banques centrales
• Les déséquilibres de la zone euro
Charles Gave, de son côté, a toujours su se positionner à contre-courant, avec une critique frontale des élites technocratiques européennes et une défense assumée des principes libéraux.
Ils ont contribué à éveiller les consciences, à bousculer le débat économique français. Ils ont joué un rôle utile.
Mais leur approche présente des limites
Le problème, c’est que leur discours s’est figé dans une logique de pessimisme permanent.
Depuis plus de dix ans, ils annoncent :
• L’éclatement de la zone euro
• L’effondrement du Japon
• Le krach final des marchés
Et pourtant, malgré les tensions, les marchés ont continué à monter, et certains pays qu’ils condamnaient (comme le Japon) ont vu leurs indices boursiers atteindre des records.
Exemple du Japon
Oui, le Japon a une démographie catastrophique. Oui, sa dette est colossale. Oui, sa banque centrale imprime de la monnaie à outrance.
Mais dans les faits, le Nikkei a battu des sommets historiques récemment. Pourquoi ? Parce que les marchés ne sont pas des copies conformes de l’économie réelle. Ils anticipent, ils réagissent à des flux de capitaux, à des dynamiques globales… parfois totalement déconnectées de la situation macro.
Le facteur politique souvent ignoré
Ce que je reproche aussi à leur discours, c’est qu’ils raisonnent souvent comme si tout dépendait des politiques.
Ils disent :
« Les gouvernements devraient faire ci, faire ça. »
« Ils n’ont pas le courage de réformer. »
Mais ils oublient une chose essentielle : les politiques ne peuvent pas imposer des réformes à un peuple qui n’en veut pas.
Retour sur l’épisode Alain Juppé – 1995
Prenons un exemple marquant : le Plan Juppé de 1995.
À l’époque, Jacques Chirac vient d’être élu président. Il nomme Alain Juppé Premier ministre avec un mandat clair : réformer la Sécurité sociale et les retraites.
Voici ce que Juppé propose :
• Réformer les régimes spéciaux (SNCF, RATP…)
• Maîtriser les dépenses de santé
• Réorganiser l’hôpital public
• Redresser les comptes sociaux
La réaction est immédiate : grève générale pendant trois semaines, blocage total du pays, transports à l’arrêt, écoles fermées, opinion publique solidaire des grévistes. C’est la plus grande mobilisation sociale depuis Mai 68.
Chirac recule. Juppé est politiquement affaibli. Et les réformes sont enterrées.
La leçon
Ce n’est pas parce qu’un gouvernement veut réformer qu’il peut le faire.
Quand un pays n’est pas prêt culturellement, historiquement, socialement, aucune réforme ne passe.
Et ça, beaucoup d’économistes l’oublient. Ils raisonnent en économistes… pas en stratèges politiques.
L’erreur de confondre économie et marchés
Autre confusion fréquente chez les économistes très critiques : penser que l’économie dicte la direction des marchés. C’est faux.
L’économie peut être en crise… et les marchés en euphorie.
Exemple : la Turquie
Hyperinflation, autoritarisme politique, effondrement de la monnaie… et pourtant, la Bourse turque a explosé à la hausse.
Pourquoi ? Parce que les marchés réagissent à d’autres facteurs : politiques monétaires, flux étrangers, effets devises, valorisations relatives.
L’analyse macroéconomique n’est pas une stratégie d’investissement.
Et c’est là que le discours de certains économistes atteint ses limites : il informe… mais il ne guide pas l’action.
Ce que je défends : une posture lucide et stratégique
Je ne nie pas les dérives systémiques. Je parle régulièrement de la dette mondiale, de l’inflation, du rôle inquiétant des banques centrales.
Mais je refuse de me laisser paralyser par la peur. Je crois à une approche différente :
• Se former
• S’adapter
• Diversifier
• Construire un portefeuille résilient
• Saisir les opportunités, même dans le chaos
La clé n’est pas d’avoir raison sur la crise à venir.
La clé, c’est d’être prêt — quoi qu’il arrive.
Conclusion : penser par soi-même
Je n’écris pas cet article pour attaquer.
Je l’écris pour inviter chacun à prendre du recul.
Respecter les voix critiques, oui. Mais ne pas les suivre aveuglément.
S’inspirer, mais garder son esprit indépendant.
Le monde est imparfait. Les marchés sont souvent absurdes.
Mais celui qui sait lire les signaux, qui sait rester flexible, qui se forme et qui agit intelligemment, peut tirer son épingle du jeu.
Ce n’est pas le plus intelligent ni le plus alarmiste qui réussit.
C’est celui qui comprend la réalité… et qui agit, pendant que les autres commentent.